Deux mesures importantes viennent d’être prises concernant le financement des entreprises :
Le décalage des échéances des prêts en cours
Les tableaux d’amortissement seront tout simplement décalés de 6 mois. Il n’est pas certain que toutes les banques adoptent les mêmes conditions financières, mais les intérêts sur cette période viendront se rajouter à la fin au capital à amortir. Cela restant à discrétion de chaque établissement, n’hésitez pas à nous indiquer les banques qui feront preuve de largesse en faisant remonter l’information dans le blog.
L’helicopter money
La circulaire du ministère de l’économie et des finances en précise les contours.
Les entreprises en difficultés de paiement avant la crise seront malheureusement exclues du dispositif.
Le prêt sera au maximum de 25 % du chiffre d’affaires 2019.
La première année il sera en différé total d’intérêts et d’amortissement. A la fin de cette période il sera possible de choisir de le rembourser ou de l’amortir sur une période ne pouvant excéder 5 ans.
La banque ne pourra pas appliquer de marge sur son taux de refinancement. Nous pouvons tabler sur un taux d’environ 0.5%.
À cela vient se rajouter la garantie octroyée par la BPI avec un coût différent selon la durée du prêt :
- 1 an : 0.25%
- 2 et 3 ans :0.5%
- 4 à 6 ans : 1%
Les effets thérapeutiques
- Les salaires seront payés à la fin du mois.
- Les entreprises pourront honorer les factures de leurs fournisseurs.
- Les entreprises pourront payer leurs loyers. Les SCPI peuvent souffler.
- L’entrepreneur pourra choisir les conditions de remboursement de ce prêt.
- Les conditions de taux et de garantie de financement de ce prêt « non affecté » sont intéressantes.
- À priori c’est open bar ! Mais y aura-t-il à boire pour tout le monde ? Le bar sera-t-il réapprovisionné ? A priori il sera difficile de laisser tomber les entreprises au milieu du gué.
- Psychologiquement cela véhicule l’idée que les décideurs politiques possèdent l’arme capable de nous sauver et que rien ne peut finalement nous arriver.
Les effets secondaires
- Beaucoup craignent l’effet inflationniste de la mesure. Nous sommes plus nuancés car cela va dépendre de l’adéquation entre la quantité d’argent injectée et l’utilisation qui en sera faite. Si cette facilité de caisse permet à une entreprise de survivre en comblant son déficit d’exploitation, cette mesure n’aura pas d’effet inflationniste. Cependant si cette facilité de caisse et demandée par précaution (ce que nous vous conseillons de faire) mais qu’elle est placée à des fins spéculatives, il en va autrement.
- Contrairement aux aides aux particuliers (chômage partiel, maladie), celle-ci sera reprise. Le remboursement, bien qu’étalé dans le temps, oblitèrera les capacités d’investissement et de développement des entreprises. Des restructurations destructives d’emplois seront probablement mises en œuvre.
- Le coût pris en charge par les régimes chômage et maladie laissent augurer une pause dans le plan de décroissance de la fiscalité directe et indirecte.
- Le déficit budgétaire devrait s’accroître engendrant un risque de dégradation de la notation des états. Pour emprunter, les états les plus fragiles devront augmenter leurs taux d’intérêts et donc accroître leur déficit budgétaire…
- Toutes les classes d’actifs étaient, avant la crise, probablement surévaluées. La crise devrait réajuster les valeurs et créer des opportunités. Cependant, l’abondance de liquidités ne va-t-elle pas faire resurgir nos vieux démons ?
En conclusion
- L’ampleur du choc et sa durée restent pour le moment inconnues. Le principe de précaution doit inciter les entrepreneurs à maximiser leurs chances de résister à la tempête en demandant à bénéficier de l’helicopter money.
- Les effets indésirables sont nombreux et importants et devront par la suite être à leur tour traités avec efficacité.
Le malade « entreprises », en arrêt cardiaque, vient d’être réanimé grâce à un électrochoc salutaire. Observons attentivement chaque jour son évolution en restant à son chevet car le chemin sera encore long avant de le voir courir dans les prés.
Il est par ailleurs peu probable que tous les pays arrivent à éradiquer totalement le virus avant qu’un vaccin ne soit trouvé. Sinon pourquoi le gouvernement aurait-il spontanément déversé 25 % du chiffre d’affaires annuel pour 3 semaines de confinement ?
Il est donc malheureusement probable que nous entendions de nouveau les pales de l’hélicoptère.
Auteurs : Lionel TOMAS (Cabinet SEFIMA) et Romain MURAILLE (Cabinet VALETYS)